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3 décembre 2011 6 03 /12 /décembre /2011 18:13

Cicéron se promenait sur l’agora d’Agrigente. Il attendait quelques amis venus de Syracuse et de Lilybée. Ses amis arrivèrent un par un et Cicéron les accueillit chaleureusement.

« Salut Gracios ! Tu es venu de Syracuse, la plus grande des villes grecques et la plus belle de toutes. Bonjour, Augustus Tullius Americus de Lilybée où j’ai été propréteur.

- Bonjour, Marcus Tullius Cicéron, lui dit Americus, je te remercie de m’avoir invité à Agrigente. Je n’y étais pas allée depuis longtemps. Ton plaidoyer contre Verrès s’est bien passé ?

- Oui, je te raconterai cela quand tous mes amis seront là. Bonjour, Archios et Myscellios de Syracuse ! Salut, Marcellus Augustus Tycalus, je suis très heureux de te revoir ! »

Les amis étant au complet, ils se promenèrent dans la ville. Cicéron se mit à parler de Verrès :

« Ce propréteur est condamnable mais je reconnais tout de même qu’il représente bien le Romain passionné par l’art grec.

- Mais, rétorqua Tyscellius, il est tout de même coupable de méfaits impardonnables. Regardez, n’est-ce pas le temple d’Hercule que l’on distingue au loin ? Verrès a forcé ce temple avec ses sbires pour le piller. Même l’amateur d’art le plus fou n’aurait pas osé le faire.

- L’art que les Grecs ont apporté, répondit calmement Cicéron, leur science, leur littérature, leurs institutions, tout cela ne justifie-t-il pas la fascination des Romains et des peuples d’Italie ? Alors que nous avons été en proie aux tyrannies les plus dures avant que Rome ne vienne imposer sa paix ?

- Les Grecs nous ont apporté beaucoup de choses, répondit Gracias, regardez Syracuse, comme Agrigente, elle possède de magnifiques constructions grecques. Des temples, des théâtres, tout cela est magnifique mais nous n’avons pas eu la paix pour autant.

- Et nous, Romains, inspirés par les Grecs, nous avons ajouté des amphithéâtres, des portiques et des thermes, déclara Tyscellius.

- Je suis d’accord avec Gracios, déclara Americus, de nombreux tyrans ont instauré la cruauté dans ces colonies. Prenez Phalaris, son histoire très cruelle.

- Quelle est cette histoire ? demanda Myscellios. Je ne la connais pas.

- Phalaris avait fait faire un taureau en bronze où il mettait les personnes qu’il désirait tuer et allumait un feu en dessous. La personne brûlait à l’intérieur du taureau.

- C’était cruel, j’en conviens, répondit Archios, mais il y eut aussi de bons tyrans. Il y a eu Théron à Agrigente et le sage Timoléon à Syracuse. Théron s’est battu contre Himère et Timoléon, doté d’une étonnante grandeur d’âme, a chassé Denys qui était mauvais.

- Les Romains n’ont pas tout arrangé, dit Cicéron. Ils ont détruit Agrigente comme ils avaient détruit Corinthe auparavant. Pour moi, les Grecs ne sont pas les plus barbares car ils ont tout de même apporté leur culture.

- Tu as tout à fait raison, déclara Archios. Lorsque Archias est venu pour fonder Syracuse, il a apporté aux autochtones des vases, des statues, de nouvelles techniques de construction… Il a modernisé les indigènes tout comme l’oikistès qui a fondé Agrigente a enseigné sa culture aux Sicules qui habitaient là. »

Tout en devisant, les promeneurs s’étaient éloignés de la ville et approchaient de la vallée des Temples.

« Regardez le temple de la Concorde, s’exclama Tycalius, ce temple n’est-il pas magnifique avec son fronton, ses métopes sculptées et ses colonnes doriques ? Et les merveilleux vases de céramique à figures rouges et noires, les sculptures en or, en marbre et en bronze. Ce sont les Grecs qui ont apporté tout cela. Toutes ces œuvres d’art valent que les Romains s’en passionnent.

- Les Grecs ont aussi apporté la science, déclara Cicéron, regardez Empédocle, ce savant végétarien, et aussi Archimède. Le soldat romain qui l’a tué n’a-t-il pas accompli un acte barbare ? Archimède était plongé dans ses réflexions et le soldat ne l’a pas reconnu.

- Il y eut aussi la littérature, dit Myscellios, mais nous avons eu Eschyle et ses tragédies, Pindare et ses poèmes célébrant les athlètes vainqueurs.

- Les Romains sont des barbares du point de vue littéraire, artistique et scientifique, résuma Americus, c’est aux Grecs que nous devons notre culture mais les colonies ont eu beaucoup de problèmes vis-à-vis des tyrans et des guerres.

- Oui, dit Tycallius, les colonies ont été détruites plusieurs fois par les Carthaginois et les Romains et ce sont les Romains qui ont tout de même fini par faire la paix.

- Mais il reste toujours des personnes barbares, Verrès en est un exemple. Il peut être fou d’art grec, cela n’empêche que piller les maisons et forcer les temples sont des actes à éviter, rétorqua Archios.

- Je trouve que Verrès est aussi une preuve que les Romains sont passionnés par ce qui est grec, dit Cicéron, comme vous l’avez dit, l’art, la science et la littérature inspirent les Romains. Pour ce qui est des guerres et des tyrannies, les apoikias (colonies) ont eu du mal à s’en sortir. Il faut dire qu’elles étaient indépendantes de leurs cités-mères. Elles n’avaient pas la même façon de gérer la ville. Elles ont donc eu plus de mal à se défendre contre les tyrans qui les gouvernaient et les guerres. Elles ont d’abord chassé les indigènes puis elles ont instauré des tyrannies cruelles. Phalaris est le meilleur exemple.

- Le peuple a pourtant lapidé Phalaris, rappela Americus, le peuple n’était donc pas si barbare et les tyrans en ont terni la grandeur. Syracuse a prospéré grâce au blé, Agrigente grâce au vin et à l’huile. Elles sont devenues deux cités importantes mais les tyrans n’ont pas su les gouverner et les ont abandonnées aux mains des Romains.

- Ils se sont tout de même bien défendus, dit Gracios. Syracuse n’est tombée qu’après trois ans de résistance grâce au génie d’Archimède.

- Malgré la guerre, les cités se sont bien développées, déclara Archios. Géla, la métropole d’Agrigente, est elle-même une colonie de Rhodes. Cela montre que les colonies ont grandi et prospéré.

- Vous êtes donc tous d’accord sur le fait que les colonies ne sont pas barbares, conclut Cicéron. Rome est barbare et elle s’intéresse à la culture grecque. »

Ils marchèrent quelque temps en silence. Le soleil couchant illuminait la vallée des temples donnant ainsi l’impression qu’elle était en feu.

« Les Romains se sont conduits en conquérants et sans aucune culture, dit Cicéron.

- Oui, l’apport hellénique est un gain pour nous, déclara Tyscellius.

- C’est un enrichissement, dit Archios. Toi, Cicéron, tu as fait des études de rhétorique. Cela montre bien que la culture grecque est présente. »

Ils arrivaient à la maison de Cicéron. Ils se dirent au revoir et chacun se dirigea vers son insula en pensant à la conversation qu’ils venaient d’avoir.

Clotilde L. D.

 

 

 

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